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Art : Trente Trente, un festival de créations contemporaines hybrides

Du 16 janvier au 2 février, cet événement culturel néo-aquitain prend place dans la métropole bordelaise. Entretien avec son directeur artistique et metteur en scène, Jean-Luc Terrade.
Des danseuses
© Landing © Cie X-press
Journaliste

Déjà une 21ᵉ édition pour le festival Trente Trente qui met les différentes formes de l’art contemporain à l’honneur dans la Métropole de Bordeaux, du 16 janvier au 2 février. Des artistes et des compagnies de France et de l’étranger seront présents. Il s’agit d’un événement porté par la Compagnie Les Marches de l’été, basée au Bouscat en Gironde. Son metteur scène, Jean-Luc Terrade est aussi le directeur artistique de Trentre Trente.

Bonjour. D’où est-ce que vient le nom de ce festival ?

Normalement, au départ, les spectacles prévus dans le cadre de ce festival ne devaient pas durer plus de 30 minutes et on partait 30 secondes. On n’a jamais fait ni l’un ni l’autre d’ailleurs. C’est vrai que maintenant, on est plutôt aux alentours de 40 minutes.

Melissa Guex, Rapunzel®Julie Folly

À quoi faut-il s’attendre quand on se rend à Trente Trente ?

On propose des spectacles pluridisciplinaires donc ça concerne tous les arts vivants : danse, musique, marionnettes, installations, cirque, théâtre. J’en oublie peut-être. En semaine, on a à peu près à deux ou trois spectacles. Le week-end, on fait des parcours de quatre ou cinq spectacles sur le territoire, donc les gens peuvent se balader dans Bordeaux ou en métropole et assister à des spectacles de formes et de disciplines différentes. On est un festival de performances et de formes, un peu marginal, hybride, qui propose ce qui n’a pas beaucoup de visibilité ici en Aquitaine.

Justement, vous parlez de spectacles hybrides qu’on ne voit pas forcément partout. Pourquoi c’était essentiel ?

Grande question. Parce que je trouve qu’il faut vraiment essayer tout le temps de déranger au spectacle. Et ce qui n’est pas facile : essayer que les gens déplacent aussi leur regard et leur esprit et puissent agrandir le champ de leur appréciation. Si on reste sur nous, sur notre confort et sur notre façon de penser, l’ouverture est difficile. On cherche une certaine forme, mais on va rejeter tout le reste. Tandis que là, ce que j’essaye de faire, c’est de proposer des spectacles dans lesquels les gens seront obligés de se déplacer et d’être un peu dérangés.

Cabinet de Curiosité Appach© Erik Damiano

Vous souhaitez les déranger à quel niveau et pourquoi ?

Pour que les gens ne soient pas confortables. Qu’ils ne soient pas consommateurs ou consommatrices d’un spectacle, mais participants, actifs du spectacle. Beaucoup de gens viennent au spectacle pour consommer, et ce n’est pas la même chose. Par exemple, dans une galerie, ils ne regardent même pas les tableaux. Ils prennent des photos, ils s’en vont. Ça, c’est de la consommation. J’essaye par le spectacle que, soit les gens s’en aillent parce que ça les dérange, soit qu’ils se mettent à une autre place que d’habitude.

Est-ce que vous auriez des exemples de performances qui ont été faites ou à venir, et qui dérangent ?

Là, me vient tout de suite à l’esprit Steven Cohen qui est un très grand performeur sud-africain basé à Bordeaux. Dernièrement, l’un de ses amis a disparu. Il lui a fait une ode avec son urne funéraire. Et tous les soirs, il prenait une poignée de son urne, la mangeait. Voilà. Bon ça, c’est le summum. Mais la façon dont il le fait, il y a une telle beauté artistique. C’est un vrai plasticien.

Sinon, j’ai mis en scène un débat sur la censure, et là, j’ai toujours pensé que les gens allaient partir. Il y avait un couple nu qui travaillait sur le rapport entre un vendeur de sexe et un monsieur de troisième âge. Ils travaillaient avec leur sexe. En même temps, c’était fait avec une telle douceur. Moi, je pensais que les gens allaient partir. Pas du tout. En même temps, au bout d’un moment, le public est habitué quand il vient à Trente Trente. Et puis, je pense qu’on peut aller très loin sur un plateau à partir du moment où même si c’est fait pour provoquer, et bien la provocation est directe.

“So slow” Cie des Limbes © Carbone Parole

Avant de se quitter, est-ce que vous auriez un dernier message à faire passer ?

C’est dire qu’il faut vraiment qu’on résiste. Parce que c’est vrai qu’à l’heure actuelle, avec tout ce qui se passe autour de nous, c’est de plus en plus compliqué d’exister et de savoir comment exister sur un plateau. On est réellement embués par le chaos qui nous entoure et par le vide. Et je pense qu’il faut résister, surtout les jeunes, parce qu’il y a beaucoup de jeunes qui abandonnent, plus qu’avant, je trouve. Je comprends, car c’est compliqué, mais je pense qu’il faut être là, il faut occuper le terrain.

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