Autoroute A69 : l’opposition enthousiaste des agriculteurs et habitants

Cette autoroute doit relier Castres à Toulouse et faire gagner quelques minutes de temps de trajet. Un dossier vieux de 50 ans qu’habitants et agriculteurs ont la ferme intention de combattre pour préserver la biodiversité.

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Autoroute Castres-Toulouse : les alternatives sont-elles possibles ?

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Autoroute A69 : pourquoi conserver les arbres est une bonne idée

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Agriculteurs, habitants : qui sont ceux qui combattent le projet A69 ?

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La mobilisation a été suivie, joyeuse, familiale. Mi-avril 2023, agriculteurs et habitants du Tarn se sont réunis à Saïx. Stands de nourriture, mini-concerts, des airs de festival pour protester contre le projet d’autoroute A69 qui doit relier Toulouse à Castres et dont les travaux ont débuté.

« Nous sommes les plus heureux du monde. Pas de débordement, une bonne ambiance et une mobilisation qui fédère derrière un projet qui n’a aucun sens », explique Laurent Prost du collectif La voie est libre.

Que contient le projet d’autoroute A69 ?

Le dossier est vieux de plus de 50 ans. Il prévoit la construction d’une autoroute entre les villes de Castres et Toulouse, dans le Sud-Ouest. Un axe long d’une cinquantaine de kilomètres qui traversera 20 communes et disposera de deux aires de repos et covoiturage. Objectif affiché par le concessionnaire privé Atosca : « désenclaver le bassin de Castres-Mazamet » et favoriser le développement économique de la région.

Le concessionnaire assure, par ailleurs, que ce nouvel axe permettra de diminuer le temps de trajet de 25 minutes « en heures creuses » et 35 minutes « aux heures de pointe ». Pour Laurent Prost, « c’est totalement faux. Plusieurs comités et expertises, notamment mandatés par les services de l’État, ont mesuré un gain de temps d’une quinzaine de minutes au mieux », explique-t-il.

La voie est libre / Facebook

Un gain à relativiser, d’autant qu’il existe déjà un axe effectuant le même trajet : la route nationale 126. « Sur certaines portions, l’autoroute A69 sera en parallèle de la RN126, à une vingtaine de mètres d’écart. »

Concernant la fréquentation, le concessionnaire attend 8400 voitures et 800 poids lourds quotidiennement. Plusieurs médias indiquent, par ailleurs, que le trajet coûtera un peu moins de 7 euros. Auquel il faudra ajouter 1€60 pour la portion de l’A68 qui permet de rejoindre Toulouse. Même si le concessionnaire promet des « forfaits », les associations pointent du doigt ces montants. « Il n’y a pas grand monde qui pourra se permettre un budget d’une dizaine d’euros par jour pour gagner 15 minutes », estime Laurent Prost.

Agriculteurs et habitants vent debout pour préserver les terres et la biodiversité

Au-delà du coût social, c’est le coût environnemental qui est pointé du doigt. Environ 300 hectares de terres agricoles sont nécessaires pour cette autoroute. Parmi les exploitations concernées, celle de Dominique Rougeau, propriétaire d’une vaste parcelle horticole. Ses pivoines font le bonheur d’une centaine de fleuristes en Occitanie. « L’autoroute doit passer en plein milieu de mon champ. Et je n’ai pas de solution autre que mettre un terme à cette activité », explique l’agriculteur.

Olivier Montégut / AirZen Radio

Le projet implique aussi la destruction d’un millier d’arbres, notamment plusieurs centaines de platanes centenaires. Thomas Brail, arboriste grimpeur, s’est justement accroché dans l’un d’eux pour empêcher leur abattage. Le concessionnaire assure pourtant vouloir en replanter trois fois plus et compenser cette perte.

« La notion de compensation n’existe pas. Replanter des arbres n’y change rien, surtout qu’ils sont souvent bien plus petits. Il faudrait des centaines d’années pour recréer l’écosystème de ces arbres, qui sont par ailleurs devenus des nids à biodiversité pour les chauves-souris, par exemple », explique Thomas Brail.

Olivier Montégut / AirZen Radio

Existe-t-il des alternatives ?

Pour les associations, il est tout à fait envisageable de réaménager l’existant. « L’État et les collectivités pourraient investir l’argent qu’ils comptent donner à un concessionnaire privé dans le réaménagement de la RN126. Un projet alternatif, qui pourrait être réévalué, suggérait la création d’aires, de créneaux de dépassement ou encore un léger rehaussement de la vitesse sur cet axe aujourd’hui limité à 80 km/h », explique Laurent Prost.

La mobilisation des agriculteurs et des associations a permis de mettre un coup d’arrêt à l’abattage des arbres. Ils comptent maintenant sur un recours judiciaire pour remettre en cause l’« intérêt public majeur » dont bénéficie l’autoroute. De son côté, le ministre des Transports Clément Baune a assuré que les travaux n’étaient pas remis en cause. Même s’il reconnaît que le dossier devrait peut-être intégrer « quelques améliorations notamment au plan écologique ».

Ce contenu audio a été diffusé le 24 mai 2023 sur AirZen Radio. Maintenant disponible en podcast sur airzen.fr, notre application et toutes les plateformes de streaming.

Par Olivier MONTEGUT

Rédacteur en chef adjoint

Agence de communication Perpignan