L’association l’Enfant bleu sensibilise sur le « sharenting »

La structure a lancé une campagne sur les dangers de cette pratique, par laquelle les parents partagent des photos de leur enfant sur les réseaux sociaux. Entretien avec Laura Morin, sa directrice nationale.

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Les missions de l’association l’Enfant bleu

Les missions de l’association l’Enfant bleu

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L’Enfant bleu, pour la protection numérique des enfants

L’Enfant bleu, pour la protection numérique des enfants

04:24

L’association l’Enfant bleu : qu’est-ce que le « sharenting » ?

L’association l’Enfant bleu : qu’est-ce que le « sharenting » ?

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Active depuis 1989, l’association nationale L’Enfant bleu lutte contre toutes les formes de maltraitances faites aux enfants. Chaque année, elle en accompagne environ 2 000. Sa dernière campagne s’est concentrée sur la sensibilisation des parents aux dangers du « sharenting », expliqué dans le livre créé pour l’occasion : “La Folle aventure du doudou d’Emma”.

Il s’agit d’une pratique où les parents partagent du contenu qui concerne leurs enfants sur les réseaux sociaux. Si cet acte peut paraître anodin, il n’est pas sans conséquences, d’où l’importance de faire de la prévention pour la structure. Laura Morin, directrice nationale de l’Enfant bleu, nous en dit plus.

Laura Morin de l'Enfant bleu
Association l’Enfant Bleu

En quoi le « sharenting » peut être problématique ?

Il y a un chiffre qui est très effrayant. 50 % des contenus pédocriminels proviennent de photos d’enfants partagés publiquement par les parents. Il faut faire très attention à ce qu’on diffuse sur Internet parce que, malheureusement, ça peut finir entre de mauvaises mains.

Cela concerne tout ce qui est sur les réseaux sociaux, sur Instagram, Facebook et autres…

Exactement. TikTok, Instagram, Facebook, tous nos réseaux sociaux. En fait, il faut savoir que si on ne prend pas le soin de sécuriser ces réseaux sociaux, n’importe qui y a accès, et dans ce n’importe qui, malheureusement, il y a des risques.

Même si le contenu est sur un compte privé ?

Il y a toujours un risque. On rappelle que ça reste Internet et qu’il y a beaucoup de gens qui savent l’utiliser comme ils en ont envie. Cela étant, il y a une réalité : le numérique fait partie de la vie. Le positionnement de l’Enfant bleu n’est pas de dire d’interdire, mais plutôt de dire de faire attention.

C’est-à-dire ?

Quand on a des réseaux sociaux, la première chose à faire c’est de s’assurer qu’ils sont sécurisés. C’est-à-dire, aller dans les paramètres et les configurer de façon qu’il y ait uniquement ce qu’on appelle “des amis” qui puissent avoir accès à nos contenus. C’est pourquoi dans le livre qu’on a sorti, “La Folle aventure du doudou d’Emma”, il y a un petit QR code. Il est aussi possible d’aller directement sur notre site. Il y a là une page dédiée qui explique comment, justement, on sécurise nos réseaux sociaux et s’assure que nos contenus ne sont pas accessibles au plus grand nombre.

Justement, de quoi parle ce livre, qui est en accès libre sur votre site ?

On a souhaité sortir ce livre au tout début de l’été. Moment de convivialité, on est sur la plage, on prend plein de belles photos de nos petits bouts et on a envie de les partager. On s’est dit que c’était le bon moment. Et l’idée, avec l’agence Havas avec qui on a développé ce livre, était de sensibiliser, mais avec un outil sympathique et agréable.

Donc, c’est l’histoire du doudou d’Emma. Elle et sa mère sont sur la plage. Et celle-ci prend une belle photo de ce doudou et la diffuse sur ses réseaux. Elle fait le tour du monde et tombe entre les mains du fan club des doudous qui en fait ce qu’il veut. En fait, il y a une double lecture. Avec les enfants et les parents ont leur dit de relire et d’imaginer leur enfant à la place de ce doudou pour qu’ils aient une prise de conscience.

L’Enfant bleu

Et ça a marché ?

On a plusieurs réactions des parents qui nous disent qu’ils ne se rendaient pas compte que ça pouvait être un danger. Mais je crois qu’on a eu quand même beaucoup de prise de conscience.  On peut partager, mais ce n’est pas anodin, il faut réfléchir et verrouiller un maximum ses réseaux sociaux.

Puis, pour compléter, il faut aussi faire attention au type de photos qu’on diffuse. Parce que quand on retrouve des contenus pédocriminels, on voit que le nom des dossiers est très classique : petit garçon sur la plage, fille gymnastique. Ce n’est pas drôle de penser à ça, mais il faut le faire pour la protection de l’enfant. Après, on n’est pas là pour incriminer qui que ce soit. On dit juste : attention, ayez conscience de tout ça.

D’ailleurs, cela pose aussi la question du droit à l’image puisque les photos sont postées sans le consentement de l’enfant ?

Alors oui, ça, c’est le droit à l’image de l’enfant. Il y a une proposition de loi en ce moment qui est en cours. J’ai pour habitude de donner un exemple, que je pense on a tous vécu quand on est trentenaire, voire plus. La maman qui rencontre son gendre, par exemple, et qui va avoir envie de sortir des photos de sa fille ou de son fils quand il était petit, dans des situations ridicules. On n’aime pas trop ça. Bah, c’est la même chose en fait. Il faut penser que l’enfant va grandir.

Et puis il y a autre chose, c’est que les recruteurs, de plus en plus, avant de recruter vont sur Google pour voir un petit peu ce qui ressort sur le candidat. Internet n’oublie rien, donc attention.

Ce contenu audio a été diffusé le 17 octobre 2023 sur AirZen Radio. Maintenant disponible en podcast sur airzen.fr, notre application et toutes les plateformes de streaming.

Par Jennifer Biabatantou

Journaliste

Agence de communication Perpignan