Zoé Klecka : “Dans le drag, chaque personne est ce qu’elle a envie d’être”

Metteuse en scène et comédienne, la jeune femme de 26 ans a récemment fait son entrée dans cet univers. Une expérience qui lui est bénéfique. Son nom de scène : Dés Astres.

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Ce que le monde du drag a apporté à Zoé Klecka

Ce que le monde du drag a apporté à Zoé Klecka

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Zoé Klecka, artiste drag, nous donne sa vision de cet univers

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Comment Zoé Klecka est entrée dans monde du drag

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Zoé, à la finale des Drag Games à Bordeaux

Zoé, à la finale des Drag Games à Bordeaux

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Arrivée en finale de la seconde édition des Drag Games à Bordeaux, Zoé Klecka, 26 ans, creuse peu à peu son sillon dans cet univers qui allie performance scénique, maquillage et vêtement. Débutante, il lui reste encore des choses explorer.

En effet, cela ne fait que quelques mois que la comédienne et metteuse en scène s’y consacre totalement au sein de la compagnie bordelaise le Grand Incendie. Mais déjà, elle a su montrer son talent en performant avec son personnage nommé Dés Astres, un être hybride, mi-fée mi-sorcière. Rencontre avec cette femme artiste qui a différentes cordes à son arc.

Collection privée Zoé Klecka

AirZen Radio. Comment avez-vous découvert l’univers drag ?

Je pense que c’était il y a à peu près six ans. À Bordeaux, il y a eu plusieurs vagues drag. À cette époque-là, le drag commençait à prendre son essor. Et moi, je suis arrivée à un moment où il y avait des soirées organisées dans des bars à Victoire [dans le centre-ville de Bordeaux, NDLR] de manière très régulière. J’y suis allée en tant que spectatrice, je n’y connaissais absolument rien. Et Camomille, qui fait du drag depuis longtemps, et qui est aussi costumière dans ma compagnie, m’a dit de venir. J’y suis allée et j’ai trouvé ça incroyable. C’est super parce que chaque personne est ce qu’elle a envie d’être, fait ce qu’il veut. Visuellement, ce que je voyais me plaisait. Il y avait un côté magique.Je me suis revue petite fille.

Quelle a été votre première expérience dans le drag ?

Un jour, l’ancien président du collectif bordelais la Casa Drag, qui organisait depuis longtemps des soirées, m’a proposé de performer parce qu’il avait besoin d’une baby drag. C’est quelqu’un qui n’a pas vraiment encore performé. Je me suis dit : pourquoi pas ? J’y suis allée, et ça m’a fait un bien fou. Vraiment, je me suis dit : c’est super.

Les premières fois, j’ai performé avec une barbe. Je ne faisais pas non plus du Drag King, mais j’avais des barbes dessinées avec des paillettes. Puis, j’ai dû faire une pause pour mes études pendant un certain temps. Mon cursus de théâtre me prenait beaucoup de temps. Et l’année dernière, j’ai décidé de m’y consacrer à fond. Ça a plutôt bien fonctionné. Et parce que j’ai fait plusieurs scènes ouvertes, j’ai participé aux Drag Games et fait partie des dernières finalistes.

Comment avez-vous construit Dés Astres, votre personnage ?

C’est un peu particulier, parce que ce n’est pas un personnage fictif, comme au théâtre. On n’est pas seulement un personnage fictif. Je trouve que c’est une démarche assez politique, parce qu’à chaque fois qu’on est sur scène, qu’on prend la parole, on peut en profiter pour faire passer des messages qui nous tiennent à cœur. Ce personnage-là s’est construit au fur et à mesure, mais pas que dans le drag, par ma pratique théâtrale aussi. J’avais envie de performer quelque chose de très personnel et, en même temps, de me permettre d’être autre chose que moi.

J’ai choisi ce nom, Dés Astres, parce que je me suis dit que c’était bien pour moi. Je me moque un peu de cette partie de moi, celle où j’ai tendance à dire que je suis trop nulle, que je n’y arriverai jamais, que je ne suis pas ceci, je suis timide. Puis, j’ai un côté petite catastrophe qui ressort avec ça. Ce personnage-là s’est donc construit autour de ça, de cette figure-là et, en même temps, de mes envies artistiques. C’est un peu féérique et je m’inspire aussi du fantastique, des esthétiques un peu sombres. J’adore aller dans de l’humour, du kitsch. C’est un endroit qui me permet d’être un crash test de moi-même.

Avoir mis un pied dans le monde du drag vous a donc permis de faire des choses que vous n’auriez pas pu faire avant ?

Oui, complètement. Ça m’a permis de rêver un peu plus grand artistiquement et pour moi-même. Des mises en scène comme celle que j’ai proposée à la finale des Drag Games, par exemple, avec beaucoup de lumière, une énorme jupe à paillettes, des danseuses qui sortent de sous ma jupe… je n’aurais pas pu proposer ces choses ailleurs, parce que je me serais potentiellement censurée. Là, je me suis dit qu’il fallait que j’aille le plus loin possible dans ce que je veux faire.

Est-ce que ça vous a apporté autre chose ?

Depuis que je fais du drag, j’ai un autre rapport à mon image. Il est beaucoup plus positif dans le sens où, avant, j’étais très intransigeante : toujours sortir bien maquillée, bien habillée, etc. Je me demandais toujours si j’étais assez ceci ou pas assez comme ça. Même les problématiques féministes que j’ai pu soulever dans le théâtre, je les mettais sur le plateau sans pour autant me les appliquer personnellement.

Et là, du fait de me retrouver projetée là-dedans, c’est moi qui performe sur scène. C’est mon corps. C’est ce que je suis, ce que je renvoie, qui performe. Ça m’a vraiment permis de lâcher prise dans ma vie parce que je me suis vue. Ça m’a donné de la force. Je me suis vue tellement forte, tellement impressionnante.

Ce contenu audio a été diffusé le 12 février 2024 sur AirZen Radio. Maintenant disponible en podcast sur airzen.fr, notre application et toutes les plateformes de streaming.

Par Jennifer Biabatantou

Journaliste

Agence de communication Perpignan