Exporter le théâtre dans les lycées de Bourgogne-Franche-Comté. C’est le principe des dispositifs Passe-Murailles du Théâtre Dijon Bourgogne. Les pièces sont alors jouées dans des salles de classes, mais aussi dans des lieux non théâtraux.
Chaque année, un artiste associé de l’établissement culturel est choisi pour une création originale. Pour cette édition, c’est au tour de Tamara Al Saadi. Elle a écrit et mis en scène “MER”.
Aborder des sujets sociétaux
Dans son spectacle, elle aborde les rapports mère/fille, mais aussi des sujets tabous, lourds, que sont l’inceste, qui conduit au suicide et au deuil. Depuis novembre dernier et jusqu’à fin avril, “MER” doit être jouée dans 20 lycées de la région. Les 126 représentations sont assurées en alternance par des duos de comédiennes sorties de l’école nationale : Ariane Courbet-Hélène Luizard et Lucile Dirand-Coline Kuentz.
Intéressée par les questions de violences sexistes et sexuelles, la metteuse en scène traite ces thématiques dans ses créations. “Par rapport à l’inceste, j’ai voulu questionner le sujet parce que le projet allait être présenté dans des établissements scolaires. Et les chiffres actuels montrent que l’inceste concerne deux à quatre élèves par classe. C’est un sujet qui est en zone grise, constate-t-elle. Au niveau institutionnel, il n’y a pas forcément la place à l’école pour en parler. Je me suis dit que j’allais le faire.”
Préparer les élèves
Auparavant, avant de présenter la pièce aux élèves, Tamara Al Saadi a souhaité les préparer en leur mettant à disposition une pléiade d’outils pédagogiques dont des vidéos, des articles, une bibliographie.
Aussi, l’autrice s’est entourée de professionnels du corps enseignant et soignant. “J’ai demandé la présence du corps médical des lycées dans lesquels “MER” est jouée. Le Théâtre Dijon Bourgogne a ressemblé les référents pédagogiques de tous les établissements accueillant le spectacle. Ils ont aussi assisté à un filage et posé leurs questions.”
Créer un espace de paroles
Par ailleurs, les représentations de “MER” ont des conséquences. La parole s’est libérée auprès de certains élèves et a donné lieu à des signalements. “Je suis plus qu’émue et bouleversée que cette pièce ait pu inviter à la parole. Qu’ils se soient sentis dans un environnement assez sécurisé pour pouvoir s’exprimer sur l’innommable violence qu’ils traversent”, confie Tamara.
Elle ajoute : “Aussi, même si les sujets dans cette pièce semble durs et difficiles, j’ai voulu par l’écriture jalonnée dans cette histoire de l’humour, de la joie, de la magie. Il s’agit d’un objet de réparation et de tendresse avant tout. L’idée est d’ouvrir une fenêtre sur des faits invisible.”
France Télévisions a d’ailleurs retransmis la pièce. Elle sera aussi accessible au grand public notamment à la Minoterie à Dijon pour Théâtre en mai.
